PORT-AU-PRINCE – À Delmas 60, à quelques encablures du ministère des Affaires étrangères, dans un ancien local du Parti haïtien tèt kale (PHTK), d’anciens militaires et de jeunes recrues (pour la plupart des fils d’anciens militaires) s’entraînent et rêvent une place à la nouvelle armée d’Haïti. Dans cette enceinte, tout est militarisé ; la discipline, les salutations, les habits. Les soldats ou aspirants soldats sont harnachés de pantalon en kaki, de maillot crème ou bleu marine, etc. Les « Forces réserves d’Haïti » comptent 3 régiments : « Les oies », « Le service secret » et « Antichoc ».

Entre quelques exercices, le régiment « Les oies » entonne son chant de guerre: « Nou se zwa, paske nou pi wo, pa gen montay ki ka pi wo ke motivasyon nou, n renmen drapo n, n renmen peyi n, sa se fyète an nou, e nou jire pou nou soude jiska lanmò. (Traduction française : Nous sommes des oies, parce que nous sommes plus haut, aucune montagne n’est au-dessus de notre motivation, nous aimons notre drapeau, nous aimons notre pays, nous jurons de rester unis jusqu’à la mort). Pour leur entraînement du jour, le régiment « Antichoc » imagine une attaque où les soldats doivent courir sur 7 mètres, survoler une bombe ou une grenade, se mettre à genoux et se coucher dans l’immédiat, rouler sur quelques centimètres pour s’exempter d’un tir et ensuite faire feu. Ceux qui ratent l’exercice sont considérés morts et, comme punition, doivent réaliser plusieurs tours de la maison.

Le régiment « Service secret », lui, est composé pour la plupart d’anciens militaires. Pantalon et cravate noirs, chemise blanche, lunettes de soleil, casquette, ces « vétérans », pour la plupart, berchus, perclus, tempes grisonnantes et visages blafards, ruminent les beaux jours où l’armée d’Haïti était synonyme de plein pouvoir. « Tout jounalis se tripotay !(…) Solda fèt pou pale fò, fòk nou gwonde ! », exulte un ancien membre du corps des « Léopards », dont on a l’impression qu’il cache un ballon de football dans le ventre. Le chef du « Service secret», André Fieffe, passe sa troupe en revue, reçoit le salut militaire et sonde la capacité de ses vieux soldats à se mettre en posture militaire sans broncher. « Le pays a besoin d’un service secret. Il faut que vous soyez prêts à occuper cette fonction si le gouvernement vous appelle », avertit-il.

Cette armée d’environ une centaine d’hommes rencontrés ce vendredi, évaluée à environ 3 000 selon leur chef David Dormé, a de grandes ambitions. « Nous avons élu deux présidents (Michel Martelly et Jovenel Moïse), maintenant nous attendons le retour à l’ordre constitutionnel, caractérisé par le retour physique des Forces armées d’Haïti (FAD’H) », a dit le Sergent David Dormé. Concédant que l’âge des anciens militaires ne leur permettra pas d’offrir un service militaire convenable, le chef de file suggère d’enrôler les concernés dans le service secret, le service d’intelligence, le service de formation, etc.

David Dormé ne pense pas qu’il y a une différence entre ses soldats et ceux qui seront recrutés par le ministère de la Défense. « Nous avons créé ce ministère. Il s’occupe de la politique de l’armée avec le gouvernement. Par contre, la Constitution reconnaît que seuls le commandant en chef et le haut état-major peuvent recruter des soldats. Nous sommes en attente. Après la nomination du commandant en chef, nous passerons au rang de soldats », a-t-il dit, soulignant qu’on ne peut pas penser la remobilisation de l’armée sans les anciens militaires. « Nous sommes le poumon de cette armée », fait-il savoir.

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Source/Le Nouvelliste
Photo/Archives
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