PORT-AU-PRINCE – Jovenel Moïse, le candidat du Parti haïtien Tèt Kale (PHTK), a été élu au premier tour de l’élection présidentielle avec 55,67 % des suffrages, selon les résultats préliminaires rendus publics, lundi 28 novembre, par le Conseil électoral provisoire (CEP). L’ingénieur Jude Célestin, de la Ligue alternative pour le progrès et l’émancipation haïtienne (Lapeh), est arrivé loin derrière avec 19,52 %, suivi de l’ancien sénateur Moïse Jean-Charles (11 %) et de Maryse Narcisse, la candidate de Fanmi Lavalas, le parti fondé par l’ancien président Jean-Bertrand Aristide, créditée de 8,99 % des suffrages.

Né en 1968 à Trou-du-Nord, Jovenel Moïse se présente comme « un petit paysan qui réussit ». Il était inconnu sur la scène politique lorsque Michel Martelly l’a choisi comme dauphin. Ce producteur de bananes est à la tête d’une plantation de mille hectares. Il veut relancer le secteur de l’agriculture, en créant dix zones de production pour l’exportation, et reconstituer l’armée, dissoute en 1995 par Jean-Bertrand Aristide. Bénéficiant de l’appui de la plupart des familles riches de l’oligarchie haïtienne et du soutien discret d’entreprises de la République dominicaine voisine, Jovenel Moïse a disposé de moyens financiers beaucoup plus importants que ses compétiteurs. Selon Pierre Espérance, militant des droits de l’homme, Jovenel Moïse a dépensé plus en publicité que les vingt-six autres candidats réunis. « Le retard pris par le processus électoral a permis à Jovenel de se détacher du clan corrompu de Martelly et de ne plus apparaître comme la créature de l’ancien président », analysait Réginald Boulos, l’une des figures les plus en vue du monde des affaires.

Le scrutin pour élire un nouveau président et compléter le Sénat et la Chambre des députés s’est déroulé dans le calme, dimanche 20 novembre. Les organisations de la société civile, qui avaient déployé plus de 4 000 observateurs sur tout le territoire, ont estimé que le taux de participation se situait entre 21 % et 23 %. Contrairement à ce qu’on pouvait craindre, les électeurs des régions du sud d’Haïti, dévastées par l’ouragan Matthew un mois et demi avant le scrutin, ont voté davantage que dans le reste du pays.

La tension est montée au cours des vingt-quatre dernières heures dans l’attente des résultats. Des tirs d’armes automatiques ont résonné tôt, lundi matin, dans les quartiers populaires de Belair, de Solino et de Delmas, à Port-au-Prince, la capitale. Une barricade de pneus enflammés a interrompu la circulation sur une artère fréquentée.

Venus des quartiers les plus ­pauvres de Port-au-Prince, des partisans de Maryse Narcisse ont manifesté en début de semaine, dénonçant « un coup d’Etat électoral » en préparation. Rudy Hérivaux, le porte-parole du PHTK, le parti fondé par l’ancien président Michel Martelly, avait proclamé la victoire de Jovenel Moïse, violant la règle interdisant aux partis d’annoncer des résultats avant le CEP.

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Source/Le Monde
Photo/Le Monde
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