PORT-AU-PRINCE – Grand-Ravine, petit quartier de Martissant, fait la une de l’actualité après la disparition du photojournaliste Vladjimir Legagneur. Si l’actuel chef de la police promet de pacifier cette zone dangereuse et dite de « non-droit », toute opération risque d’être vouée à l’échec, selon l’ex-patron de la PNH, Mario Andrésol, qui a reçu une équipe du Nouvelliste pour un entretien sur ces zones de « non-droit » dans la perspective d’un grand reportage sur ces quartiers en décembre dernier.
Grand-Ravine, tout comme d’autres quartiers populaires de Port-au-Prince, s’érige comme une guérilla urbaine pour les agents de l’ordre, a estimé l’ancien chef de la PNH. Mario Andrésol, qui a accordé un entretien au journal Le Nouvelliste. L’ex-numéro un de la PNH pense que la police n’est pas entraînée à faire des interventions dans ces zones vu leur position géographique difficile.
Si Michel-Ange Gédéon promet de pacifier Grand-Ravine après la disparition du photojournaliste Legagneur, indiquant qu’aucun quartier ne devrait être un défi pour les forces de l’ordre, Mario Andresol, lors de cet entretien, croit que la configuration géographique du terrain n’est pas favorable à la police.
« Il faut connaitre la zone et avoir une stratégie pour arrêter les vrais bandits. Sinon, toute opération d’envergure tournera au carnage. On ne peut pas donc exposer les agents des forces de l’ordre dans une opération vouée à l’échec », a-t-il suggéré avant d’évoquer un problème à la fois stratégique et tactique.
Mario Andrésol a en mémoire la bévue des agents de l’UDMO lors de l’opération de la police à Grand-Ravine, le 14 novembre dernier. D’après lui, une opération qui dure plus d’une heure dans une zone réputée fragile risque de faire des dommages collatéraux. « On devrait lancer une opération coup de poing afin que les bandits n’aient pas eu le temps de se regrouper ». a-t-il préconisé.
Il a fait remarquer que lors de son mandat à la tête de la PNH, il ne s’adonnait pas à une logique de confrontation avec la population vivant dans ces quartiers populaires. (Cité Soleil, Bel-Air, La Saline, Grand-Ravine, Ti Bwa, etc). Il a expliqué avoir repris le contrôle de ses zones en adoptant une autre approche en faisant en sorte que la population ait confiance aux agents de police via la police de proximité. « Le fait que les agents de police ne soient pas présents dans ces zones, explique pourquoi les bandits prennent le relais », s’est désolé Mario Andrésol.
Il continue pour dire que la sécurité publique requiert maints paramètres. Mario Andrésol regrette qu’il n’y ait pas une politique publique de sécurité en Haïti. Ce qui pousse le haut-état major des forces de sécurité à jouer souvent la carte de la prudence. « Il ne fait que gérer son mandat, car il n’a pas les moyens pour mener des actions. » L’ex-patron de la PNH se questionne plus loin sur le service d’urgence de l’État et le plan de sécurité nationale mis en place. M. Andrésol pense qu’on n’est pas prêt à en finir avec ses zones de « non-droit ».
« On risque d’être confronté le même problème que celui à Canaan », a-t-il prédit, signalant que la présence des commissariats n’épargne pas l’insécurité dans les quartiers populaires. « Il n’y a pas une politique d’urbanisation et d’aménagement, ces zones sont inaccessibles à des opérations de la police. Les agents rentrent dans un labyrinthe. Il faut un travail socioéconomique dans ces zones pour endiguer ce phénomène qui est désormais récurent », a ajouté Mario Andrésol.
De l’avis de Mario Andrésol, le problème de la relève des bandits formant les gangs armés dans les quartiers populaires est dû au fait que l’État n’ait pas pris ses responsabilités pour éviter que ces gens ne moisissent dans la misère.
Pour l’ex-DG Mario Andrésol, les autorités politiques (élus) doivent collaborer à pacifier les zones de « non-droit ». Les élus doivent être interpellés pour éviter que la situation ne s’envenime davantage, a-t-il dit. La police est un maillon de la chaîne, a-t-il insisté lors de cet entretien. Il a confirmé que des gangs armés impliqués dans des actes odieux étaient présents dans les environnements immédiats des élus locaux. Il considère cela comme la criminalisation de la politique.
Ces derniers, qui jouissent de l’immunité des élus locaux, circulent dans les voitures officielles, a pesté M. Andrésol. Parfois, l’élu ne connait pas l’identité de ceux qu’il fréquente, a-t-il nuancé plus loin. Mario Andrésol croit que les élus doivent contacter la DCPJ avant de recruter un civil comme un agent de sécurité rapproché. « La réalité politique met la police dans l’embarras », a-t-conclu.
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Source/RTVC
Photo/Archives
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