PORT-AU-PRINCE – Le commissaire du gouvernement, Me Jacques Lafontant, a remis sa démission le mercredi 22 juillet 2020 au ministre de la Justice. «J’ai choisi de ne plus être votre subalterne, et je vous soumets ma démission qui a un effet immédiat», a-t-il écrit à Me Rockfeller Vincent. Le torchon brûlait depuis un certain temps entre les deux hommes de loi. Me Lafontant refusait de donner suite à une instruction de son supérieur hiérarchique. En outre, l’ancien chef du parquet a dépeint un parcours professionnel reprochable du ministre de la Justice. Avant que sa lettre ne circule sur les réseaux sociaux, le Premier ministre Joseph Jouthe avait garanti qu’il n’y avait aucun «désaccord» entre les deux intéressés.
Dans une correspondance en date du 22 juillet 2020, Me Jacques Lafontant s’est démis du poste de commissaire du gouvernement de Port-au-Prince mercredi, soit deux jours après avoir été blâmé le 20 juillet pour insubordination au ministre de la Justice, Me Rockfeller Vincent. Dans sa lettre, l’avocat a rappelé à son ancien supérieur hiérarchique la différence existant entre les «rumeurs persistantes» sur des questions relatives à l’insécurité foncière et le conflit du droit de propriété et «les faits avérés».
Comme pour mettre à nu son opposition à son supérieur hiérarchique, le commissaire du gouvernement par intérim n’a pas hésité à camper le portrait de Me Rockfeller Vincent dans une tournure interrogative. «À qui reproche-t-on la libération de plusieurs bandits impliqués dans des actes d’enlèvement, de viol et de vol de véhicules lorsqu’il était commissaire du gouvernement près le tribunal de première instance du Cap-Haïtien en 2006 ? », écrit-il dans un premier temps.
Plus loin, il s’est questionné sur qui a été l’objet de reproches et épinglé successivement, suivant des rapports d’enquête, dans des actes de corruption et de libération irrégulière sous l’administration des ex-ministres Henry Marge Dorléans en 2005 et Paul Denis en 2009. Enfonçant le clou, Me Jacques Lafontant s’interroge : « Plus récemment, qui a été l’objet de révocation pour improductivité sous l’administration de l’ex-ministre Heidi Fortuné ? »
Après avoir tracé son parcours dans trois entités de l’Université d’État d’Haïti (UEH), à l’Université Quisqueya (UNIQ) et à Paris-Est Créteil, le commissaire démissionnaire a défendu l’authenticité de son parcours académique.
En ce qui concerne le sujet litigieux, Me Jacques Lafontant a souligné que tout conflit relatif au droit de propriété relève de la compétence exclusive du tribunal civil. Cependant, en sa qualité de garant de l’ordre social, il a confié avoir déjà adopté des dispositions concernant les plaintes qui lui ont été soumises.
De plus, lorsqu’il était responsable de la cellule d’exequatur sous l’administration du commissaire Paul Éronce Villard, ressasse Jacques Lafontant, aucun scandale n’a été enregistré sous la délivrance d’exequatur. L’ancien chef du parquet a révélé que le scandale auquel fait référence la lettre du ministre de la Justice remonte à 2016 et l’exequatur a été délivré par un autre substitut commissaire du gouvernement. Celui-ci était membre du cabinet de Me Rockfeller Vincent lorsqu’il était à la tête de l’ULCC.
Ce mercredi matin, alors qu’il était en visite au palais de Justice, le Premier ministre Joseph Jouthe a d’abord écarté l’idée de désaccord entre le commissaire du gouvernement et son ministre de tutelle. Ensuite, il a fait mention de «frottement» entre eux, tout en cocluant au final qu’ils sont condamnés à travailler ensemble.
Dans un message vocal associé à son timbre vocal et qui est devenu viral, Me Jacques Lafontant refusait catégoriquement d’exécuter les consignes de son supérieur hiérarchique.
Source/Le Nouvelliste
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