PORT-AU-PRINCE – Haïti est un pays qui fascine et qui est difficile à appréhender. Mais, à force d’observer et de réfléchir sur la réalité haïtienne, on finit par avoir un minimum de compréhension de sa structure et de son fonctionnement. Haïti produit depuis des lustres de grands écrivains, mais nombre d’entre eux n’ont jamais pu arriver à développer des idées pour l’avancement du pays. L’instabilité politique qui prévaut en Haïti est la résultante de la guerre des gangs. L’affaire de blanchiment d’argent du président élu Jovenel Moise reflète bien cette guerre de gangs.

En effet, c’est sous l’administration de Michel Martelly avec Laurent Lamothe comme premier ministre en Mai 2013 que la BNC a alerté l’UCREF sur des transactions douteuses effectuées sur un compte en banque de Jovenel Moise. L’UCREF s’était saisi du dossier, mais comme l’administration Martelly était empathique vis-à-vis de Jovenel Moise, aucune investigation sérieuse ne pouvait être entreprise. C’est durant la transition que la nouvelle direction de l’UCREF a repris en main le dossier et produit un rapport substantiel adressé au Commissaire du gouvernement Jean Danton Léger. À la réception du rapport détaillé de l’UCREF, le Commissaire du gouvernement de Port-au-Prince l’a analysé et a jugé bon de le transférer au Cabinet d’instruction en Septembre 2016. Au lieu de chercher à faire la lumière sur l’affaire Jovenel Moise, certains acteurs préfèrent plutôt parler de manipulation politique et veut l’étouffer.

Jovenel Moise est victime de la guerre des gangs qui a prévalu sur l’administration Martelly. Nous savons qu’il y avait plusieurs clans sous le règne de Martelly. Et, le clan de Sophia Martelly a pu déloger Laurent Lamothe de la primature. Nous nous demandons bien si Laurent Lamothe n’avait pas anticipé le choix de Jovenel Moise comme candidat à la présidence et décidé de le piéger. Laurent Lamothe a son mot à dire dans ce dossier vu que c’est sous son gouvernement qu’on a entravé le travail de l’UCREF et la marche de la justice. Nous devons dire qu’avec la lutte contre la corruption, le système bancaire est obligé d’agir avec célérité.

Si l’administration de Martelly avait le pouvoir de faire autrement, elle aurait passé des ordres formels aux responsables de la BNC pour ne pas alerter l’UCREF. Malheureusement, les procédures ont été observées, mais le pouvoir Martelly a joué pieds et mains pour sauver la peau de Jovenel Moise. Il faut préciser qu’il y a eu une velléité de la part d’un secteur pour cacher les faits et que c’est au nom de la politique que l’affaire a refait surface dans la presse aujourd’hui. Nous respectons le travail de l’UCREF et nous saluons le courage de Mr. Sonel Jean-François qui a pris son mâle courage à deux mains pour fournir un travail de qualité. Maintenant, il revient au juge instructeur Breddy Fabien de faire toute la lumière sur ce dossier.

Je suis d’avis que le président Jovenel Moise devrait attendre la fin de l’enquête avant de prêter serment. Si l’on pense vraiment à construire une démocratie viable, à rétablir l’autorité de l’état et à porter la population et les étrangers à avoir foi en nos dirigeants, il faut bien que l’on puisse compter sur le bon caractère de ces derniers. Je ne considère pas Jovenel Moise comme une victime, mais bien un naïf. L’ULCC, organisme d’état dirigé par Mr. Lionel Constant Bourgoin a indexé des prêts accordés à Jovenel Moise par la BPH comme étant des prêts n’ayant pas respectés les normes administratives respectives. Il va falloir bien que l’ULCC mène de plus amples enquêtes afin de faire la lumière sur ces prêts accordés à Jovenel Moise. Je veux bien accorder le bénéfice du doute au président élu. Mais, la justice doit faire son cours.

Haïti est un pays à genou où les dirigeants ont la réputation d’être des gens vils et mafieux. Si nous voulons le respect des autres nations et recouvrer notre souveraineté perdue, il faut bien que l’on puisse faire le nettoyage chez nous avec les moyens du bord. J’ai suivi avec grand intérêt l’hypocrisie de certains gens éduqués en Haïti et dans la diaspora dans le dossier de Guy Philippe qui clament haut et fort que ce dernier devrait être jugé en Haïti. Mais, j’aimerais bien qu’ils me disent combien de trafiquants de drogue la justice haïtienne a pu juger et sanctionner. La justice haïtienne bancale et mourante a indexé Marc Antoine Acra dans l’affaire de drogue du bateau Manzanares. Jusqu’à présent, aucune démarche n’est entreprise pour lancer un mandat international contre ce dernier et obtenir son arrestation. Au contraire, le président élu a trouvé bon de rencontrer Marc Antoine Acra sous le fallacieux argument qu’il est un citoyen haïtien et non un repris de justice alors qu’il sait bien que le monsieur est un fugitif en cavale.

Nous faisons de notre mieux pour ne pas acculer Jovenel Moise qui se présente comme étant un entrepreneur qui a réussi sa vie. Nous voulons être lucide et objectif dans nos prises de position. Une investigation en bonne et due forme doit être menée sur Jovenel Moise afin de dissiper tout doute sur sa personne. C’est le moment ou jamais pour des organismes comme le Conseil Electoral Provisoire de demander des comptes à tous les candidats sur la provenance de leurs fonds de campagne. Haïti est depuis plus de deux décennies une plaque tournante de la drogue où des blanchisseurs d’argent font la pluie et le beau temps. On ne peut pas permettre à une certaine mafia d’avoir le contrôle de la présidence via un blanchisseur d’argent que la justice n’a pu intercepter.

Je sais qu’Haïti est loin d’être un état de droit, je sais que nos leaders politiques et l’oligarchie essaient journellement de tuer l’espoir dans le cœur de nos jeunes. Mais, il faut que le pays puisse prendre un autre tournant pour que l’espoir puisse renaitre dans le cœur de tous. J’aurais souhaité que les autorités en place, plus particulièrement le juge d’instruction Breddy Fabien puissent réaliser qu’ils sont en position de sauver le pays d’une impasse et qu’ils assument leurs responsabilités face à la nation. Mon souhait à l’endroit de Jovenel Moise est qu’il se mette à la disposition de la justice et laisser l’instruction du dossier faire son cours. S’il est de bonne foi et qu’il soit innocent que l’on réhabilite.

Que la justice puisse agir effectivement comme une femme aux yeux bandés!

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Source/Radio Télévision Caraibes
Photo/Archives
www.anmwe.com

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