PORT-AU-PRINCE – Les résidents de Santo, Shada, Croix-des-Missions, Butte Boyer, « Anba Mapou », « Dèyè simityè » sont tenaillés par deux groupes armés depuis l’aube du dimanche 24 avril. Des membres du groupe 400 Mawozo tentent de reprendre le contrôle de ces quartiers, échappés à leur contrôle depuis 2018, et dirigé par un autre chef de gang dénommé « Chien méchant ». Des rafales d’armes automatiques sont entendues depuis dimanche matin. Les habitants, craignant pour leur vie, sont obligés de se terrer. Selon certains témoins, ceux qui s’aventurent à sortir sont atteints de projectile.

De Croix-des-Missions jusqu’à Canaan 3, les activités sont au point mort. Pas de circulation automobile. Des barricades sont remarquées dans certaines artères. Un véritable état de siège. Une résidente qui s’est confiée au Nouvelliste sous couvert de l’anonymat a fait part de son angoisse. « Nous avons vraiment peur. C’est choquant et inquiétant. Les tirs ne cessent de résonner. On les entend de plus en plus proches. On ne sait pas quand ils vont entrer dans les maisons et ce qu’ils s’apprêtent à nous faire subir », a raconté cette dame.

Aucun bilan officiel n’est encore communiqué sur ces affrontements. La police n’a pas répondu aux sollicitations du Nouvelliste. La résidente qui s’est confiée au Nouvelliste a révélé avoir perdu un proche. « J’ai un ami qui a été tué alors qu’il tentait de sortir de chez lui pour aller travailler. J’ai une autre amie qui a été blessée par balle et qui se fait soigner à l’hôpital », a-t-elle raconté, indiquant que les bandits incendient les maisons dans les quartiers dont ils parviennent à reprendre le contrôle, notamment Clercine et Butte Boyer. Sur les réseaux sociaux, nombreux sont les internautes habitant dans ces zones qui ont également lancé des cris d’alarme ou craché leur colère. « Le pire, cela se passe à des dizaines de mètres d’un sous-commissariat », a dénoncé une utilisatrice de Facebook. « Mon happy Sunday est un concert de balles », s’est plaint une autre, partagée entre ironie, colère et désolation. Des dizaines de familles, fuyant les affrontements, ont été remarquées ce lundi sur la place de Clercine, à un jet de pierre de la base de la Brigade d’intervention motorisée (BIM) de la PNH.

Le Réseau national de défense des droits humains (RNDDH) ne dispose pas encore de données sur ces affrontements. Contacté par le journal, Pierre Espérance indique qu’il faut du temps pour retrouver des témoins et des victimes. Le directeur exécutif du RNDDH a dénoncé le laxisme des autorités en ce qui concerne l’action des gangs armés. « Je pense que l’insécurité est politique. Pour résoudre ce problème on n’a qu’à empêcher les bandits de se ravitailler en armes et en munitions. Les armes et munitions passent dans les ports et les frontières. Elles passent notamment par le port de Port-au-Prince. Les autorités doivent instaurer l’état d’urgence en renforçant la police et la justice. Depuis 2018, il n’y a eu aucun procès pour juger les bandits. Quand la police les arrête, ils sont libérés sans aucune forme de procès et grâce à la complicité de certaines autorités », a expliqué Pierre Espérance, qui a appelé à mettre un terme à l’impunité dont jouissent ces malfrats.

Source/Le Nouvelliste
Photo/Archives
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