PORT-AU-PRINCE – L’accident vasculaire cérébral (AVC) qu’a subi le sénateur Nawoon Marcellus en pleine séance mardi n’a rien d’un cas particulier en Haïti. 40 à 50% des admissions du service des urgences de l’Hôpital de l’Université d’État d’Haïti sont des cas d’AVC. On estime que les maladies chroniques sont les principaux facteurs de risque, notamment l’hypertension artérielle qui représente la première cause de décès dans le pays. Si le cas du parlementaire a suscité des remous, il doit cependant rappeler qu’il y a 2 millions de personnes qui souffrent d’hypertension artérielle, 350 000 diabétiques- qui sont à risque- alors que le manque d’implication des autorités dans la gestion et la prise en charge de ces pathologies est criant.

« L’AVC est l’abréviation des accidents vasculaires cérébraux. Il s’agit d’un accident qui se passe dans un vaisseau au niveau du cerveau. Il est considéré comme une maladie grave. La gravité peut varier selon le vaisseau atteint et la pathologie en cours. Ça peut aller d’un accident transitoire qui dure juste quelques minutes à un accident plus grave qui peut durer un certain temps. L’accident peut provoquer une déviation des lèvres, la perte du langage, un, deux ou quatre membres paralysés selon la localisation de l’accident », a longuement expliqué le Dr Elsie Méttelus Chalumeau, chef de service de l’HUEH en interview ce jeudi à la salle de conférence dudit hôpital.

Un AVC survient lorsque le flux sanguin vers une partie ou une autre du cerveau rencontre un obstacle. L’hématologue continue pour préciser qu’il y a deux grandes catégories d’AVC. L’AVC ischémique, c’est quand au niveau du sang il y a un caillot qui est formé et qui bloque sa circulation. Le tissu devant recevoir ce sang n’est plus alimenté et devient comme mort.

La deuxième possibilité, c’est quand il y a une rupture d’une artère dans le cerveau pour une raison ou pour une autre à l’occasion d’une forte augmentation brusque de l’hypertension artérielle. Alors on parle d’AVC hémorragique. Dans ce cas, une bonne prise en charge médicale et surtout une réhabilitation à la longue est nécessaire pour éviter la paralysie des membres. Néanmoins la personne victime peut rester avec des déficits. « Dans les deux cas, l’accident cause une souffrance tissulaire. Il y a un tissu qui souffre par manque de sang. Et cela n’aboutira qu’à des troubles neurologiques», a indiqué le Dr Chalumeau, précisant que ces accidents sont secondaires à des facteurs prédisposants.

Selon le médecin, les facteurs de risque sont multiples. Les maladies vasculaires, les maladies hémorragiques et les maladies chroniques sont les principaux facteurs. L’anémie falciforme peut causer un accident ischémique chez un enfant qui en présente les formes sévères. Le facteur de l’âge n’est non plus négligeable.

Autrefois les gens victimes d’AVC étaient avancés en âge. Mais aujourd’hui, le constat démontre que la tranche d’âge diminue considérablement », a affirmé le chef du service des urgences de l’HUEH, le Dr Préden Morinvil, qui révèle que 40 à 50% des admissions du service des urgences de l’Hôpital de l’Université d’État d’Haïti sont des cas d’AVC.

« La situation est grave », a réagi le Dr Nancy Charles Larco, directrice de la Fondation haïtienne de diabète et des maladies cardio-vasculaires (FHADIMAC). Au cours d’une interview téléphonique, le Dr Larco rappelle que 2 millions de personnes souffrent d’hypertension artérielle et 350 000 sont diabétiques. L’hypertension représente la première cause de mortalité en Haïti, par contre le diabète est la 4e cause de décès en Haïti. Ces gens sont à risque.

On peut prévenir un AVC. Au niveau de la FHADIMAC, elle informe qu’il y a des tests disponibles pouvant évaluer les artères. « 85% des cas d’ACV peuvent se prévenir », a-t-elle déclaré, exhortant la population à avoir une bonne hygiène de vie, c’est-à-dire, « il faut manger sainement, -moins de graisse, moins de sel, moins de sucre-, éviter la sédentarité et pratiquer le sport.

Lors d’une conférence de presse tenue en novembre dernier, la directrice de la FHADIMAC avait dénoncé le manque d’implication des autorités dans la gestion et la prise en charge des maladies chroniques en Haïti. « On bat la grosse caisse autour du sida, du choléra mais pas autour des maladies chroniques. Au niveau de la FHADIMAC, organisation privée, nous remplissons notre devoir civique. Mais les instances concernées doivent faire beaucoup plus de bruit concernant les maladies chroniques », a lancé le Dr Nancy Charles Larco.

Ce jeudi, le médecin a encore rappelé que cette situation n’inquiétait pas les instances parce que ce sont les malades qui paient intégralement leurs soins. Elle avoue dans la foulée qu’un groupe de pression a été constitué entre la FHADIMAC, le MSPP et d’autres entreprises travaillant dans la prise en charge des maladies chroniques en vue de réfléchir sur ce fléau (maladies chroniques) qui chaque jour prend de l’ ampleur en raison de plusieurs facteurs y compris le stress.

Le Dr Nancy Charles Larco dit souhaiter qu’avec ce qui vient de se passer au Sénat, les sénateurs se penchent sur les vraies causes de décès des Haïtiens. « La nécessité aujourd’hui, c’est la prévention », a-t-elle conclu.

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Source/Le Nouvelliste
Photo/Archives
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