J’ai lu une pertinente réflexion de Mme Junia Barreau qui constate avec indignation que la bêtise (haïtienne) refuse de mourir. Je me permets de reprendre et de problématiser une partie du titre de son message dans une perspective liminaire : Pourquoi la bêtise (haïtienne) ne meure pas ?

Au demeurant, il faut saluer la perspicacité de l’analyse de Madame Barreau dont le contenu combien riche est utile et édifiant en ces temps de basses eaux intelligentes. Au vrai c’est un prétexte pour nous aider à voir un peu plus clair dans cette nuit obscène et barbare qui s’épaicit et augure pour ceux et celles qui habitent profondément Haïti des lendemains remplis d’échecs humains et de douleurs atroces.

Du reste, je l’ai déjà dit face à l’entêtement des crapules dans la bêtise, nous devons à notre tour nous regrouper en faisant de nos étincelles d’intelligence un flambeau pour illuminer haiti et montrer la voie pour briser le cycle de la bêtise.
Mais, comme nous le constatons tous, la bêtise haïtienne est bien vivante et même puissante ! Ses manifestations sont multiformes, parce que s’inventant toujours des moyens de se reproduire et de se réinventer. Ah, qu’il est fécond et foisonnant, l’immense fumier haïtien où s’entassent par piles des ordures qui empestent la vie. Force est de reconnaitre que la bêtise ne se pare plus des faux-semblants habituels qui jadis la dissimulaient dans la voix de quelques illustres barbares et de quelques fanatiques grivois rendus fréquentables par une machine infernale qui se nourrit de l’appétit immodéré de pouvoir et de richesse de certains hommes et de certaines femmes dit-on cultivés.

Et la bêtise est si vivante, j’allais dire intelligente au sens où tout organisme vivant porte la mémoire de l’intelligence humaine, oui elle est si subtile qu’elle se renouvelle sans cesse, sans même nous laisser le temps de la voir grandir. Et c’est avec étonnement que nous constatons que tout, autour de nous, participe de cette bêtise qui, tel un immense fumier, pollue et obscurcit tout.

Les mauvaises langues disent que Dieu dans sa malédiction a dit : que la bêtise soit ! Et la société civile haïtienne fut. S’intriguant par monts et par vaux, pour trouver de petits débouchés et de petites opportunités qui enfument, cette société civile, dans sa version crapule, menace tous les acquis démocratiques pour lesquels le peuple haïtien a payé un lourd tribut ces 50 dernières années.

Sinueuse, la bêtise avance en hordes crapules déterminées, n’hésitant pas à jeter les masques pour révéler les visages immondes s’abritant derrière les capes qui, longtemps, ont su se faire passer qui pour des diplomates, qui pour des évêques, qui pour des pasteurs, qui pour des hommes d’affaires, qui pour des acteurs non étatiques, qui pour des associations professionnelles..
Implacable, la bêtise a dévoyé le sens de toutes les luttes et de tous les sacrifices consentis ces dernières années. Au contact de sa puanteur, tout a été perverti. Les droits humains, l’éducation, la justice, et les élections sont devenus des cycles d’affaires qui permettent de devenir acteurs non étatiques pour partager, sans en assumer les responsabilités, le buffet des charognards qui dépècent Haïti .

Oui la bêtise enfle et les nuits haïtiennes sont pleines d’horreur. Car nul ne connait le visage de la barbarie qui naitra du jour d’après. Car :
• quand l’église haïtienne (toutes confessions confondues) offre ses atours de sanctification et ses habits pour encenser et célébrer la bêtise,
• quand les groupes dominants de la société, pour protéger leurs intérêts, proposent toujours le pire contre le meilleur,
• quand les associations professionnelles (tous métiers confondus) renoncent à toute éthique pour profiter des financements douteux qui structurent nos dysfonctionnements,
• quand les politiciens, animaux politiques patentés et assumés jouent, sans appartenance idéologique, à la chaise musicale et aux équilibristes pour exister socialement et échapper à leur passé de gangsters,
• quand aucune force sociale n’est porteuse de projets à dominante éthique et citoyenne ,
• quand individuellement chacun ne pense qu’à échapper à la précarité soit en s’exilant, soit en se taisant, soit en se compromettant…
… il n’y a malheureusement que de place pour la bêtise.

Oui la bêtise vit parce que nous avons fait d’Haïti un immense terroir où les ordures fleurissent et se fructifient, où la pourriture se célèbre et se réinvente. Nous avons accepté de côtoyer la bêtise, allant jusqu’à vivre dans son intimité dans un corps à corps laissant transpirer des effluves que nous ne savons plus distinguer.

Mais ce n’est pas un hasard. Car cette bêtise est portée par une dynamique qui se retrouve à tous les échelons de la vie sociale haïtienne et qui est objectivement identifiable par une équation dont les variables sont : Imposture, Irresponsabilité et Impunité.

Voilà le cycle qui structure et réinvente la bêtise haïtienne……Pour autant il n’est pas une fatalité. Car il peut être brisé pour laisser la place à un autre cycle plus soucieux des hommes et des résultats. Un cycle qui permettra de magnifier l’intelligence de chacun, de chaque groupe, à travers des règles d’éthique, pour faire flamber la dignité humaine. Un cycle où la solidarité de nos puissants voisins s’exprimera par des liens de dignité tissés avec le peuple haïtien à travers des diplomates plus dignes, plus éthiquement responsables.

Mais Cela demande du courage et des sacrifices ! Cela exige des hommes et des femmes qui acceptent de vivre dans la cohérence d’une pensée éthique, d’une action militante et citoyenne. Des hommes et des femmes capables de renoncer aux opportunités qui abêtissent et rendent indignes pour s’engager, avec leur compétence et leur motivation, dans la lutte contre l’imposture multiforme qui nous déshumanise.

Demandons nous aussi pourquoi ce sont toujours les syndicats qui font peur ? Pourquoi n’y a-t-il jamais une marche des universitaires, des intellectuels, des médecins, des journalistes, des ingénieurs contre l’indignité ? Pourquoi ne pas profiter de cette conjoncture abêtissante pour faire du 12 janvier une célébration de la dignité ? Pourquoi l’intelligence collective haïtienne ne peut pas se rassembler le 12 janvier prochain pour dans une marche solennelle dire au monde entier que « Nous sommes haitiens et nous avons une dignité et des droits aussi » ? Pourquoi ne pas profiter de cette commémoration pour rappeler à ceux qui dénoncent toujours la barbarie des autres que « la seule vraie barbarie c’est le mépris et le déni des droits des êtres humains ». Pourquoi sommes-nous toujours prêts à nous solidariser, par procuration, avec les émotions des autres alors que nous désertons les espaces de notre dignité et de notre intelligence ?

Demandons nous aussi avec quel culot ces donneurs de leçon de la bonne gouvernance et de l’état de droit viendront nous parler des vertus improbables de l’audit, de la transparence, quand jusqu’au cou ils sont descendus dans la fange pour défendre la bêtise électorale ?

Mais vient un moment où il faut savoir arrêter la progression dans la puanteur sinon on finira par ne plus se reconnaitre. Alors le choix est simple : Indignons-nous collectivement ! Flambons ce pays virtuellement et littéralement par notre intelligence et notre dignité pour que la bêtise disparaisse et laisse la place au flambeau étincelant qui nous permettra de recouvrer notre humanité enfouie sous le fumier immonde et fécond de l’imposture.

Et pour finir, faisons un doigt d’honneur aux bêtisiers
Disons-leur :

Merde aux dealers !
Rappelons aux Ordures
Que leur destin n’est que pourriture.
Osons dire aux crapules
Qu’ils soient curés ou consuls
Que sur leur face indigne
Nous accrocherons en guise d’insigne
La recommandation principale de la commission électorale :
Ordures vous êtes et dans la pourriture vous poursuivrez votre pastorale.
Je m’en voudrais de ne pas paraphraser cette pensée tirée d’un article publié sur le site du journal en ligne le grand soir :
Quand les charognards de la diplomatie internationale s’apprêtent à dépecer un pays, ils s’arrangent pour placer à sa tête une ordure pour mieux renifler la pourriture qui s’exhale au loin.

Un indigné haïtien.
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Source/Alter Presse
Photo/Archives
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