Santo Domingo Le président dominicain, Danilo Medina, a déposé jeudi le projet de loi visant à régulariser la situation des Dominicains d’origine étrangère visés par l’arrêt 168/13 de la Cour constitutionnelle dominicaine. Cette loi prévoit deux manières pour les personnes nées de parents étrangers d’accéder à la nationalité dominicaine.
Après plusieurs mois d’attente, le président Danilo Medina a levé le suspense. Les milliers de Dominicains victimes de l’arrêt de la Cour constitutionnelle dominicaine connaissent enfin leur sort. Pour les personnes nées en République dominicaine, détentrices de documents officiels livrés par le gouvernement, les reconnaissant comme citoyens dominicains, la loi prévoit de légaliser leurs documents. Une façon de leur permettre de jouir de tous les privilèges réservés aux citoyens de la république voisine.
« Il s’agit de permettre à ces hommes et femmes, qui ont vécu toute leur vie avec une identité juridique dominicaine, qui, dans de nombreux cas, ont obtenu leurs certificats de l’enseignement primaire et secondaire, et certains même ont voté ou se sont mariés, de mener leur vie normalement », a expliqué le président Medina dans sa correspondance au Congrès national. Il affirme plus loin que « régulariser ces documents est le moyen le plus juste, rapide et définitif pour mettre fin à l’incertitude de ces personnes et de leurs descendants, et bannir à jamais la possibilité que leurs droits soient restreints par des lacunes administratives dont ils n’avaient pas la responsabilité ».
Ceux-là qui sont nés en terre voisine et ne détenant pas les documents les reconnaissant comme citoyens dominicains doivent être en mesure de prouver qu’ils ont effectivement pris naissance en terre voisine. Un délai de 90 jours est accordé à ces personnes pour prouver qu’elles sont nées en République dominicaine avant d’intégrer le plan de régularisation des étrangers. A défaut d’éléments de preuve, ces sans-papiers seront obligés de prendre la voie de la naturalisation pour devenir officiellement dominicains.
« Le président Medina présente un projet de loi équilibré et de consensus », titre le service de presse de la présidence dominicaine dans le communiqué publié sur le site web de la présidence. « L’objectif a toujours été de parvenir à une solution qui répond à deux objectifs principaux : d’abord, sauvegarder les intérêts nationaux et le strict respect de la loi de la République, et en particulier, les arrêts de la Cour constitutionnelle. Et garantir les droits fondamentaux de toutes les personnes résidant en République dominicaine, en particulier celles qui sont nées et élevées dans le pays ».
Le projet de loi très attendu a été déposé au Congrès national de la République dominicaine jeudi matin par le ministre de l’Intérieur et de la Police, José Ramón Fadul, qui est aussi le conseiller juridique du pouvoir exécutif dominicain. Le ministre Fadul a été reçu par le président de la Chambre des députés, César Pina Toribio, qui était accompagné des porte-parole des différents regroupements de parlementaires. « Nous accueillons avec beaucoup de joie le dépôt de ce projet de loi au Congrès national dominicain », a réagi l’ambassadeur d’Haïti en République dominicaine, Fritz Cinéas. Ce dernier, qui venait de recevoir le document.
L’ambasadeur d’Haïti affirme avoir déjà vu des intentions positives dans ce document qui permettrait aux personnes concernées de régulariser leur statut. Pour Edwin Paraison, directeur exécutif de la fondation Zile, ce projet de loi du président Medina est « une formule salomonique cherchant à donner une réponse juridique et politique à la situation créée par l’arrêt 168/13 de la Cour constitutionnelle dominicaine et satisfaire toutes les parties impliquées ». L’ancien ministre des Haïtiens vivant à l’étranger dit souhaiter que les débats ne tardent pas trop au législatif afin de résoudre de façon définitive ce dossier.
Le président Medina a dû passer plusieurs semaines à concerter avec les différents secteurs de la société dominicaine avant d’arriver à cette loi. « La loi que les parlementaires ont maintenant entre leurs mains est un processus juste d’un consensus social. S’éloignant des extrêmes rhétoriques, cette initiative est une occasion de moderniser nos bases de données, tout en donnant une solution pratique à toutes les personnes nées dans le pays pour poursuivre leurs vies avec dignité et mettre ainsi fin à ce cycle d’irrégularités », a expliqué le président Medina. Le dépôt de ce projet de loi devrait faciliter la reprise du dialogue entamé entre Haïti et la République dominicaine.
La commission de haut niveau qui a représenté Haïti au dialogue avait décidé de suspendre les pourparlers en attendant la publication de cette loi par le président Medina. Celui-ci était censé faire le dépôt de cette loi depuis le mois de février écoulé, à l’occasion de la rentrée parlementaire. A partir de l’entrée en vigueur de cette loi, le ministre de l’Intérieur dominicain précise que tous les illégaux seront expulsés de la République dominicaine.
Source/Louis-Joseph Olivier/[email protected]
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